dimanche 22 décembre 2013

Stationnement sur rue: bonne ou mauvaise idée?

Dans le monde moderne, il est nécessaire d'avoir des stationnements pour les voitures. La question principale est de savoir si ces stationnements doivent être hors rue ou sur rue.

Les stationnements hors rue sont tous les stationnements à proprement parler, il y en a plusieurs types, publics ou privés, réservés ou ouverts à tous...
Il y a les stationnements commerciaux, très communs. Ce sont des stationnements privés, ouverts aux clients des commerces...

 ...les résidences dans les quartiers bâtis après l'arrivée de la voiture en ont aussi, incluant les garages...
 ... il y a aussi des stationnements souterrains...
...ou étagés, qui sont généralement privés, mais parfois publics, ouverts à tous ou réservés à des employés.

Les stationnements sur rue quant à eux sont généralement des stationnements en parallèle dans les accotements:
 Parfois, ces stationnements sont en biais, voire perpendiculaires à la rue.
 Au niveau de l'urbanisme, le choix entre les deux types de stationnement n'est pas innocent. Chaque type a ses effets sur les qualités urbaines d'un quartier.

Points positifs des stationnements sur rue

Les stationnements sur rue sont généralement plus limités que ceux hors rue, la longueur et la largeur de la rue réduisent la surface potentielle que peuvent occuper les stationnements. Comme ceux-ci sont répartis également le long des rues, on peut croire qu'ils permettent de réduire les obstacles à la densité. Un grand stationnement hors rue peut former une véritable barrière aux piétons, un milieu hostile et non accueillant, ce qui peut créer un trou dans le tissu urbain. Et effectivement, c'est le cas pour les grands stationnements hors rue, on n'a qu'à voir les stationnements sur les boulevards commerciaux comme Taschereau pour réaliser l'effet que des stationnements hors rue démesurés ont. On ne se sent pas tant dans une ville que dans un champ d'asphalte avec des bâtisses éparpillées.

Certains diraient que, comme les stationnements sur rue tendent à être publics et donc partagés, il n'est pas nécessaire d'en avoir autant que des stationnements hors rue. Mais des stationnements hors rue également peuvent être publics, ce n'est pas le modèle qui est généralement retenu, mais c'est un modèle possible.

Généralement, la raison principale pour laquelle les urbanistes nord-américains affectionnent particulièrement les stationnements sur rue est qu'ils peuvent être une mesure d'apaisement de la circulation. Effectivement, si les rues sont trop larges, les conducteurs tendent à conduire trop vite, ce qui est dangereux pour les piétons et cyclistes, et ce qui dissuadent les déplacements actifs. Si deux rangées de voitures sont présentes de bord et d'autre de la rue, le largeur de la chaussée disponible sera réduite, incitant les conducteurs à réduire leur vitesse.

Voici de quoi ont l'air les rues à sens unique ou à double sens sans voiture stationnée. Le bloc vert représente une voiture en mouvement, la flèche rouge représente le "corridor" perçu par le conducteur:

 Maintenant, voyons voir ce qui arrive quand nous ajoutons de nombreuses voitures stationnées dans les accotements:


Le corridor perçu est réduit significativement, ce qui incite les conducteurs à ralentir et à faire plus attention.

Points négatifs des stationnements sur rue

Les stationnements sur rue n'ont pas que des avantages. Tout d'abord, au niveau esthétique, ça donne deux rangées de voiture en permanence le long des rues, donc on repassera. Ensuite, ça cause un problème majeur pour les cyclistes, qui sont forcés de circuler entre les voitures stationnées et les voitures en circulation. C'est une situation très déplaisante, il suffit d'accrocher un des rétroviseurs des voitures stationnées ou de se faire accrocher par une voiture pour se faire projeter au sol et possiblement rouler dessus. À cela s'ajoute le problème des portes qui peuvent s'ouvrir en face, car dans un tel contexte, on force les cyclistes à faire ce qu'on leur dit généralement de ne JAMAIS faire, soit circuler dans la "zone de porte" des voitures stationnées.
Je parle d'expérience, après être déménagé à Lasalle, je suis allé au centre-ville en vélo, et ne connaissant pas les pistes cyclables du coin, je me suis ramassé à faire un bout sur la rue Notre-Dame.
Imaginez rouler à bicyclette là-dedans. Ça fait du cardio sans faire d'effort, votre coeur bat à milles à l'heure sans que vous pédaliez vite. En fait, voici comment JE voyais ça:
Donc, pour les cyclistes, c'est l'horreur.

Ensuite, un problème majeur est, qu'ironiquement, les stationnements sur rue imposent de construire des rues beaucoup trop larges. S'il n'y a pas de stationnement sur la rue, pas besoin d'accotement de 2 mètres de chaque côté, on peut faire des rues de 4 mètres pour le sens unique et de 6-7 mètres pour les deux sens. Ce sont des rues qui en soi ne sont pas propices à de grandes vitesses, et qui sont faciles à traverser pour les piétons et cyclistes. Ça nous permet aussi de construire plus densément.

Mais bien entendu, cet argument ne vaut que pour les nouveaux quartiers, pour ceux existant avec des largeurs excessives, on ne peut pas vraiment densifier en réduisant la rue existante, et le problème de la vitesse se pose vraiment, alors que pouvons-nous faire? Et bien, on pourrait simplement les modifier pour gazonner les accotements et y planter des arbres, ou y mettre des pistes cyclables.


Il me semble que ces aménagements sont beaucoup plus plaisants que l'aménagement avec des stationnements sur rue, et plus sécuritaires pour tous les usagers de la route.

Finalement, les stationnements sur rue compliquent les opérations de déneigement et de nettoyage des rues, il faut se débarrasser des voitures stationnées avant de faire quoi que ce soit sur la rue. L'entretien des places de stationnement est également à la charge de tous, à moins d'être tarifées d'une manière ou d'une autre, alors que l'entretien des stationnements hors rue privés incombe aux propriétaires.

Mon opinion

À mon avis:
  1. Les stationnements sur rue devraient être exclusivement du stationnement courte durée: disponibles surtout en face de commerce, dont avec des places uniquement pour ceux ramassant ce qu'ils ont acheté. C'est un retour aux vieilles habitudes, quand la voiture a été introduite, il était illégal de laisser une voiture stationnée sur la voie publique toute la nuit.
  2. Dans les rues résidentielles, le stationnement sur rue devrait être absent ou rare, réservé aux visiteurs, les propriétaires qui veulent des voitures devraient avoir à construire et entretenir des places de stationnement sur leur terrain ou louer des places de stationnement dans des stationnements hors-rue payants. Le stationnement sur le terrain doit être optionnel par contre et non imposé dans le zonage.
  3. Il est préférable d'avoir des stationnements hors rue de petite superficie répartis dans un quartier, qui sont ouverts à tous et tarifés (avec des permis mensuels pour les résidents et des tarifs pour le stationnement de courte ou longue durée), ainsi on évite de créer des no-man's land et on garde les voitures à l'écart de la voie publique le plus possible, permettant de donner plus d'espace aux piétons et cyclistes.

Ce qui se fait en banlieue... ou, le pire des deux mondes

Dans les rues résidentielles en banlieue, il y a souvent le pire des deux mondes... On impose des places de stationnement hors rue ET on construit des rues beaucoup trop larges pour permettre le stationnement hors rue. Le résultat est une rue excessivement large, incitant les gens à la vitesse, et un nombre de places de stationnement effarant.

Par exemple, cette rue d'un nouveau quartier de la banlieue de Québec, Bourg-Royal:

La rue fait 11,5 mètres de large, amplement suffisant pour des stationnements de chaque côté de la rue tout en permettant deux voitures circulant en sens inverse de se croiser sans souci. Et pourtant, chaque maison dispose d'un stationnement hors rue qui peut facilement accueillir 4 voitures! Ainsi, en additionnant le stationnement hors rue et sur rue, on obtient 7 places de stationnement par maison unifamiliale! Ou, dans les faits, on parle de 2 ou 3 places de stationnement par adulte en âge de conduire.

Le résultat: des excès de vitesse à prévoir, un quartier hostile à la marche (malgré les trottoirs), une très basse densité et dont le tiers de la superficie environ est asphaltée pour offrir des stationnements ou une voie de circulation aux voitures.

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