vendredi 23 août 2013

Le SRB, une fausse bonne idée. Partie 1: Qu'est-ce qu'un SRB

Montréal est présentement en campagne électorale municipale pour le 3 novembre. Bien que les enjeux principaux semblent être la corruption, il y a beaucoup d'autres enjeux qui sont très importants, surtout au niveau de l'urbanisme. Un d'entre eux est le transport en commun. Richard Bergeron du parti Projet Montréal a fait d'un projet de tramway sa pièce maîtresse au niveau du transport en commun. C'est un projet sur lequel tout le monde semble en accord en théorie, mais seulement Projet Montréal semble avoir la volonté politique de la réaliser à courte échéance.

Au contraire, Mélanie Joly, qui se targue d'être la candidate des jeunes et des idées novatrices, propose de remiser toute expansion du métro (sauf de la ligne bleue jusqu'à Pie-IX) et tout projet de tramway. Sa solution? Le SRB, le Service Rapide par Bus.

Qu'est-ce que le SRB

Pour expliquer le SRB, il est préférable d'expliquer un peu la base du transport en commun, il y a essentiellement trois types de transport en commun, que Jarrett Walker de HumanTransit.org qualifie de: local, express et rapide.

Le service local est un service d'autobus (normalement) ordinaire, avec des arrêts fréquents, à chaque 200 mètres environ, qui circule en général sur des voies partagées avec les voitures, et qui fait souvent beaucoup de détours pour maximiser la zone couverte. Le résultat est un service lent, mais qui atteint un grand nombre de personnes.

Le service express est un service qui ressemble au local, mais qui possède un long tronçon où il circule sans s'arrêter à grande vitesse. Par exemple, les lignes d'autobus de banlieue qui font le tour d'un quartier de banlieue éloigné puis embarquent sur l'autoroute pour amener le monde au centre-ville.

Finalement, il y a le service rapide. Comme son nom l'indique, sa caractéristique principale est la vitesse. Les arrêts sont plus espacés, de 400 à 800 mètres en général, et les arrêts sont conçus pour permettre l'entrée et la sortie rapide d'usagers (pensez au métro où des douzaines de portes s'ouvrent en même temps pour permettre aux gens de sortir et d'entrer rapidement). Comme ça, le temps passé aux arrêts est diminué, accélérant le service. Le service est généralement séparé de la circulation ordinaire, que ce soit avec des rails ou sur des voies réservées, de sorte que la congestion n'ait pas ou peu d'impact. Contrairement au service local, le service rapide est généralement en ligne droite, pour la vitesse, encore une fois. Son rôle est de relier le coeur de quartiers denses, chaque arrêt est à la fois origine et destination.


Les transports en commun utilisent différents moyens de transport, il y a les autobus, les métros, les tramways et autres SLR (systèmes légers sur rails), les trains de banlieue, les monorails, etc... Mais de loin le système le plus commun en Amérique du Nord est l'autobus. Toutefois, celui-ci est principalement utilisé pour faire un service local, qui peut être atrocement lent en ville. Le service rapide est plus couramment exploité avec des trains, des métros et des tramways.

L'idée du SRB, c'est de tenter d'utiliser les autobus pour offrir un service rapide, au lieu d'utiliser un métro ou un tramway. Pour ce faire, on copie les manières de faire des métros et des tramways:

  1. Le circuit est plus direct, avec moins de détours: cela réduit la distance à parcourir.
  2. Le nombre d'arrêts est réduit: au lieu d'un arrêt à chaque 200-300 mètres, on ne conserve qu'un arrêt par 400 à 800 mètres, ce qui limite le nombre de fois où les véhicules doivent s'arrêter.
  3. On adopte le pré-paiement et on permet l'entrée à partir de toutes les portes du véhicules: le pré-paiement consiste à payer son passage à l'arrêt, qui est souvent transformé en station plutôt qu'en simple arrêt, de sorte que le conducteur n'ait pas à contrôler chaque personne entrant dans le véhicule. Ceci permet d'accélérer l'embarquement qui peut même se faire à partir de chaque porte.
  4. On fait circuler l'autobus sur des voies réservées, voir sur une route exclusive aux autobus (busway): ceci permet aux autobus de ne pas être affectés par la congestion sur les artères principales.
  5. On accorde la priorité aux autobus aux intersections ou on modifie les routes pour éliminer les intersections: ceci permet également de diminuer le nombre de fois où les autobus doivent s'immobiliser.
Le résultat est un autobus beaucoup plus rapide, surtout en milieu urbain, et un service souvent plus fréquent et fiable pour les usagers. Si vous avez un trajet de 10 km, que vous avez 2 autobus et qu'ils circulent à 10 km/h en moyenne, vous ne pouvez offrir qu'un autobus à chaque 30 minutes, car ça prend une heure à chaque autobus de faire le trajet. Si la vitesse des autobus est augmentée à 30 km/h, alors vous pouvez offrir un service à chaque 10 minutes, sans acheter d'autre autobus.

Ce type de service existe à quelques endroits. Le système le plus près est à Ottawa, où les autobus circulent sur une route interdite aux voitures, le transitway, et où chaque arrêt est en fait une station comme une station de tramway. Les deux villes avec les systèmes de SRB les plus développés sont en Amérique Latine, soit à Curitiba au Brésil et à Bogotá en Colombie où le Transmileno est une route à deux voies par direction empruntée exclusivement par les autobus.

Les promoteurs de l'idée prétendent que le système peut être mis en place à une fraction du coût d'un métro (150 à 300 millions le kilomètre) ou d'un tramway (15 à 70 millions le kilomètre). Mélanie Joly mentionne entre autre un coût de 4,8 millions le kilomètre pour le réseau qu'elle propose, pour un total de 130 kilomètres de SRB pour le coût d'une ligne de tramway de 14 km telle que celle proposée par Projet Montréal.

Ça sonne si bien, alors pourquoi est-ce que je dis que c'est une fausse bonne idée? Je vais l'expliquer dans un prochain message.

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